Léo, le lad, finissait toujours sa corvée du matin par le plus intéressant, le box de Salto. Une drôle d'idée que ce nom, Salto. Il y a trois ans c'était l'année des S et on avait vu une quantité de Solo, Soleil, Sortilège et Solfège apparaître, et même un Soliflore avait fleurit dans les prés de la planète Mauve. Des bêtes racées, grandes comme des veaux à la naissance, d'un beau poil luisant et d'une crinière si peu fournie, qu'on croyait ces petits complètement chauves. La crinière poussait à vue d'oeil ensuite quand l'animal grandissait. A trois ans, la bête était adulte, prête à rejoindre l'armée dans sa conquête des autres planètes du système extra-solaire. En même temps, Salto méritait bien son nom, il était souple, toujours prêt à bondir, à faire des pirouettes, à vouloir s'amuser comme un jeune chiot ! Un jeune chiot d'un mètre soixante au garrot maintenant, soit dix centimètres de plus que Léo, qui grandissait encore mais moins vite que son protégé.
Léo, l'ado, se força à se reconcentrer sur sa tâche, d'abord apporter de l'eau. Salto en buvait vingt litres, matin et soir (ses gênes équins sans doute), puis remettre de la paille fraîche, retirer les crottins de la nuit. Ensuite Léo dosait la ration de protéines de Salto. Là, il fallait faire vite pour ne pas se laisser happer par la machoire du fauve qui allait se jeter sur la viande sanglante (ses gènes félins sans doute). Alors, Léo regardait d'un air fasciné le chevalion, corps de cheval et tête de Lion, déchiqueter sa ration.Puis Léo repartait vers la cantine , à la fois écoeuré et l'estomac dans les talons.
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