Rassoul tue la vieille Nana Alia. Et au moment, où il la tue, il se rappelle sa lecture de "Crime et châtiment" de Dostoeïvski. Pourquoi juste à ce moment ? S'il s'en était rappelé avant, il n'aurait sûrement pas commis ce meurtre. Car il sait , il l'a lu, qu'après un crime le remord consume le criminel. Alors pourquoi ? Par amour pour Souphia? Pour se venger de Nana Alia qui pousse Souphia à la prostitution ? pour l'argent ? pour oublier que son père est mort? pour oublier la guerre civile qui fait rage dans Kaboul ? Rassoul entend alors du bruit et se sauve. Une femme, vêtue d'un tchadari bleu ciel, vient de rentrer. Il entend son hurlement en s'enfuyant. Plus tard, il échappe à un tir de roquette, revient sur les lieux du crime, revoit la femme au tchadari bleu. Pendant des jours, il erre dans Kaboul. Le lecteur entend les pensées, de Rassoul, le parallèle qu'il fait entre son geste et le livre "Crime et châtiment". Son cousin essaie de l'aider (intéressé ou altruiste?). Souphia, sa fiancée, essaie de l'aider mais aphone, Rassoul ne peut avouer son crime. Il semble qu'il perd un peu la raison, d'autant plus que le corps de sa victime n'est pas découvert : Quelqu'un a t il fait disparaître le corps ou bien a t il rêvé tout cela ? Comme il ne peut plus parler, il couche sur le papier son crime, sa rencontre avec Souphia ......
.
"C'était un jour de printemps. L'Armée rouge avait déjà quitté l'Afghanistan, et les moudjahidin ne s'étaient pas encore emparés du pouvoir. Je venais de rentrer de Leningrad. Pourquoi j'y étais parti, c'est une autre histoire que je ne peux pas raconter ici, dans ce cahier. Revenons à ce jour où je te rencontrai pour la première fois. Il y a presque un an et demi. C'était à la bibliothèque de l'université de Kaboul, où je travaillais. Tu vins demander un livre, mais tu emportas mon coeur. Lorsque je te vis, ton regard, fuyant et pudique, m'intima de ne plus respirer, ton nom imprégna mon souffle : Souphia". (p 37)
.
Ce livre, même s'il se passe en temps de guerre, n'est pas un livre sur la guerre, plutôt une réflexion personnelle sur la vie et la mort, et aussi sur la fameuse loi du talion : oeil pour oeil, dent pour dent.
.
"Au dehors, tout le monde tire sans savoir pourquoi ni contre qui.
On tire.
On tire...
La balle trouvera sa cible."(p185)
.
Si on pense souvent à Raskolnikov, le héros de Dostoeïvski, on pense aussi souvent à Kafka, dans ce monde absurde. Par exemple, ce dialogue entre le greffier et Rassoul quand celui ci, ayant retrouvé sa voix, se rend au palais de justice. Il souhaite être jugé lors d'un procès (à nouveau Kafka)
.
"- Qu'est ce que vous lui voulez à ce monsieur le procureur ?
- Je suis venu me livrer à la justice.
- Ah désolé, il n'y a personne pour vous accueillir.
Etonné mais aussi énervé, Rassoul s'approche de lui et tente de parler sereinement, avec sa voix cassée : "Je ne suis pas venu pour être accueilli. Je suis venu.... " hausse la voix en articulant chaque mot " ....POUR ME RENDRE A LA JUSTICE !
- J'ai bien compris. Moi aussi je me rends tous les matins à la justice. Et ce jeune homme aussi.
- Mais moi, je viens pour être arrêté. Je suis un criminel.
- Alors revenez demain. Il n'y a personne aujourd'hui. " p198
En conclusion : un livre très riche qui m'a passionné (et pourtant j'hésitais à le prendre à la bibli, ayant des appréhensions sur ce sujet de la guerre mais ce n'est pas du tout un livre pesant et pour moi, la fin (très ouverte, c'est au lecteur d'imaginer le sort de Rassoul) est porteuse d'espoir.