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31 mai 2013 5 31 /05 /mai /2013 05:44
ORMESSON AMOUR DIEU
Lecture commune avec Eeguab
Jean d'Ormesson choisit dans ce livre de raconter l'histoire d'une famille (dont on ne saura pas le nom) de 1900 environ à 1970 (1975 est la date de parution de ce livre). Sans être l'histoire de sa propre famille, il semblerait que celle-ci l'ait largement inspiré. Au travers de la vie de cette famille noble, il nous fait découvrir les changements de la société qui vont s'opérer à travers ce siècle (de la naissance du narrateur)  en passant par deux guerres mondiales, une crise non moins mondiale et un après-guerre turbulent. L'histoire s'accélère et la famille se disperse.... 
Le parti pris n'est pas de raconter sa vie ; le narrateur est un simple spectateur, ne parle pas de ses sentiments, n'a pas de réelle chair .....un témoin plutôt. Il se pose en  rapporteur d'un climat, d'une évolution dans la vie de cette famille et par là même de la société. (je n'ai pas lu ce livre avec la couverture que je met en début de l'article mais je la trouve adaptée : une personne observe (contemple ?) l'évolution de ses contemporains.
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Le fil conducteur reste le grand père du narrateur, patriarche d'une nombreuse famille. Lui aussi évolue tout au long du livre : d'abord farouchement royaliste et anti républicain, il finit par devenir patriote et défend les valeurs républicaines.
Après un bref rappel de l'origine de la famille, qui remonte aux croisades, le narrateur commence par  l'entrée de cette famille dans le monde que l'on appelle moderne : l'oncle Paul épouse la belle Gabrielle et ses millions. Les quatre fils de Paul et Gabrielle (le narrateur est leur cousin) évoluent, se marient, ont des enfants, prennent position dans un siècle qui traverse de nombreuses crises. 
"Les miens n'avaient aucun orgueil à titre d'individus. Ils le réservaient tout entier à l'ensemble de la famille. Peut être une partie de ce que je vais vous raconter pourra-t-elle s'expliquer par ce rôle assez mince que jouaient les individus dans notre vie collective. Aucun d'entre nous ne comptait par lui même. Ce qui comptait c'était cette lignée qui avait débuté un jour, presque en même temps que l'histoire, et qui se poursuivait à travers le monde, sous tant de forme différentes, sous tant d'uniformes opposés, dans tant de pays divers, et toujours simultanément, par un mystère adorable à tant d'époques si éloignées". (p 22)
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Jean d'Ormesson revient plusieurs fois sur la devise de la famille "Au plaisir de Dieu" 
"Le sens de la famille,l'amour de Dieu, un certain abandon à la force des choses n'avait pas développé chez nous la croyance au libre arbitre et à la responsabilité. Le responsable c'était Dieu. La décision lui appartenait. Et la liberté : une faribole. Chacun était mené par son passé, par ses souvenirs, par la présence absente des morts, par tout le poids de la tradition". p 65  
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Le père du narrateur meurt au front pendant la première guerre mondiale et celui ci est élevé dans le château familial avec ses trois cousins. Vers ses quinze ans, un précepteur Mr Comte est engagé pour l'éducation des quatre cousins. Il va leur ouvrir les yeux sur le monde extérieur, forger leur caractère et leur faire découvrir la littérature. "Nous portions un monde en nous, mais nous ne le savions pas. L'instrument de cet découverte dont je peux bien dire qu'elle bouleversa nos vie, ce furent les livres. M Comte ne fit peut être qu'un chose mais elle fut décisive: il nous appris à lire." p 124.  
 
En 1925 (date réelle de la naissance de J D'Ormesson, le narrateur a alors une vingtaine d'années et s'exprime ainsi :  
"Chaque membre de la famille parait mener désormais sa propre existence. Nous n'en sommes pas encore aux déchaînements d'individualisme qui marqueront notre deuxième après-guerre. Mais à l'intérieur même du groupe, les modes de vie commencent déjà à se différencier. Il n'y a plus cette collectivité, cet organisme, cette totalité qui s'appelait la famille. IL y a Un Tel,  et puis Un Tel et puis encore Un Tel. Ils portent le même nom , voilà tout. Au plaisir de Dieu. La devise de la famille, elle aussi change lentement de sens. Une vague nuance d'insolence et de fatalité l'emporte insensiblement sur la notion de triomphe au sein  de la soumission." p212
De nombreux évènements sont évoqués, l'art , l'économie. Les réflexions sur la place de l'argent dans cette famille reviennent assez souvent :  
"Nous voilà ruinés. Ce n'était rien. D'abord naturellement, parce que l'argent ne comptait pas. Et aussi parce que la ruine, comme souvent dans les familles bourgeoises, nous laissait de beaux restes, de quoi tenir notre rang et vivre très largement." p 222
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En filigrane, on suit cette famille à Paris mais surtout  à Plessis-les-Vaudreuil,  qui sera vendue, faute d'argent pour entretenir cette propriété, cette vente sera le symbole de l'éclatement de la famille et du triomphe de l'individualisme. 
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En conclusion : un livre intéressant qui traverse un siècle d'événements nombreux et la fin d'un monde (pas uniquement pour cette famille). La partie qui m'a le plus intéressée est celle entre 1930 et 1945 où on voit comment les quatre garçons élevés ensemble évoluent très différemment et prennent des chemins totalement séparés : certains soutiennent le maréchal Pétain et d'autres s'engagent dans la résistance. J'ai également aimé l'humour et le recul de l'auteur sur la baisse d'influence de Dieu dans le destin familial. Une annexe à la fin du livre  présente les différents et nombreux personnages par ordre alphabétique et à l'entrée "Dieu", on peut y lire (je cite de mémoire car j'ai rendu le livre à la bibliothèque) "Dieu , vieil ami de la famille, l'a un peu laissée tomber vers la fin".
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commentaires

D
je l'ai lu lors de sa sortie, ce qui m'a donné le goût de lire cet auteur très subtile<br /> j'avais bien aimé ce livre très autobiographique (au moins pour sa famille et ce lieu familial
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V
<br /> <br /> Oui,  un auteur subtil que je relirai volontiers ;-)<br /> <br /> <br /> Bonne soirée Denis <br /> <br /> <br /> <br />
L
Ah !! J'adore l'annexe avec Dieu !! lol<br /> Un livre qui doit être enrichissant je pense, car je trouve intéressant l'évolution qu'il peut y avoir sur une si longue période ! Il me plait bien !!je note merci ;)<br /> bises
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V
<br /> <br /> cet auteur a souvent un humour assez irrésistible  ;-)<br /> <br /> <br /> bises <br /> <br /> <br /> <br />
E
Je suis vraiment heureux du plaisir que tu as pris Au plaisir de Dieu.Tes extraits sont bien choisis.Pour moi ce fut un régal également.On recommence une LC quand tu veux.
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V
<br /> <br /> oui une bonne lecture (il m'a certainement manqué un peu de références en Histoire pour tout comprendre)<br /> <br /> <br /> Comme c'est un livre plutôt épais emprunté à la bibli, j'en ai lu un petit peu chaque soir , tranquillement, en prenant le temps ...<br /> <br /> <br /> Bonne soirée Eeguab.<br /> <br /> <br /> <br />
E
Bonjour Val.J ereviens ce soir,et je publie ce soir.A tout à l'heure.
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V
<br /> <br /> Chouette, j'essaie aussi de passer te lire ce soir (mais pas sûr parce que là y'a une histoire de Franklin la Tortue  à lire en priorité ;-) <br /> <br /> <br /> <br />